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vendredi 18 mai 2012

Trois bonnes raisons ( non 4 !) pour ne pas toucher à Facebook

Le réseau social qui a fait l’objet d’un film fait son entrée en bourse aujourd’hui, les médias ne parlent que de cela ou presque et bien que les opinions des commentateurs sur l’intérêt du titre ne soient pas très positives en général – le contrarien en moi aurait alors tendance à penser que Facebook pourrait donc créer la surprise - , il me paraît opportun de rappeler pourquoi il ne faut pas acheter des introductions en bourse, et Facebook en particulier.


Pourquoi ?


1) Il s’agit ici du point de vue de l’analyste technique. Il est préférable d’avoir une méthode et de se fixer un seuil de perte qui a un sens d’un point de vue technique. Acheter à l’ouverture ou le jour de l’IPO est une mauvaise idée. Il est bien plus sage d’attendre quelques semaines d’échanges, voire la fin de la période de lock-up de 6 mois (à l’issue de laquelle les insiders peuvent submerger le marché de ventes) pour avoir des points de repère en termes de cours, et pouvoir fixer un seuil de sortie en cas d’évolution négative. Les récentes introductions en bourse de Groupon, Yelp, Zynga et LinkedIn, l’ont encore prouvé, ces titres, surtout les trois premiers, se sont avérés des daubes pour ceux qui ont acheté le jour de l’IPO. Certes, LNKD est en hausse de quelques 35% mais a aussi chuté dans la même proportion plus tôt, garder un titre en baisse de plus de 30%, ce n’est pas ce que j’appelle limiter les risques . Tant que le titre ne traite pas en bourse depuis quelques jours , il n’est pas possible de jauger la demande future pour le titre et sa « personnalité ». Aux dernières nouvelles, Facebook s’échangerait quelques heures après l’ouverture à … $38 , le cours d’introduction ! Quand je parlais de daube…



2) Facebook est introduit à une valorisation déjà très riche, beaucoup trop riche selon beaucoup d’analystes (Mark Zuckerberg doit certainement remercier Ben Bernanke pour cela ). Au prix d’introduction de $ 38, Facebook est valorisé à plus de 100 fois les bénéfices, ce qui en fait un des trois titres les plus chers du S&P 500, à 26 fois les ventes, c’est le titre le plus surévalué du S&P selon le Price/sales ratio. Facebook vaut ainsi plus de 100 milliards de dollars, Google par comparaison valait seulement quelques 20 milliards de dollars lors de son IPO !
L’introduction en bourse de Facebook est aussi la plus importante jamais réalisée dans le secteur de l’internet en termes de capitaux levés. En général, les méga IPO ne s’avèrent pas des high flyers. C’est parce qu’un petit flottant (nombre d’actions en circulation) est plus propice à une forte ascension du cours, mais Facebook a émis 421 millions d’actions !
De plus et ceci est une nouveauté , l'IPO de Facebook n'est pas la première occasion pour les investisseurs d'acheter le titre , des actions s'échangeaient depuis longtemps "off exchange" entre investisseurs professionnels , ceci a sans doute contribué à cette valorisation déjà très riche. C'est dire que beaucoup de poids lourds qui voulaient investir dans Facebook l'ont fait depuis longtemps et l'IPO est pour eux une occasion de revendre avec profit . La demande aujourd'hui vient plus des particuliers que des institutionnels et ce n'est pas un bon signe.


3) La croissance de Facebook est déjà en baisse ! La croissance des utilisateurs ralentit. L’entreprise a annoncé des bénéfices en baisse au premier trimestre sur fond de ventes en baisse et de coûts plus élevés. GM a annoncé la fin de son programme de publicité sur Facebook, l’opération s’étant avérée décevante (GM maintient ses opérations marketing sur FB toutefois) . Une des raisons derrière le succès phénoménal de Facebook c’est que le réseau social fut très vite adopté par les annonceurs qui y virent un parfait moyen de servir de la publicité calquée sur les profils des utilisateurs et de générer du buzz.

La Facebook mania serait-elle juste une autre mode , et faudrait-il faire un parallèle avec MySpace ? Même si j’aimerais y croire ( quand les écoliers doivent être sur Facebook sous peine d’être mal vus par leurs petits camarades on se demande où l’on va ) pas nécessairement, Facebook a incontestablement construit en 8 ans une marque globale comme Google, avec 1 milliard d’utilisateurs. Donc Facebook ne va pas disparaître d’ici 5 ans comme spéculait un article de Forbes, cependant il est improbable que la croissance soit au rendez-vous . Déjà aujourd’hui plus de la moitié de ses utilisateurs avouent ne jamais cliquer sur les publicités de Facebook. Si Facebook peut gagner des utilisateurs dans les pays où l’accès à l’internet se développe encore, Facebook pourrait aussi voir les défections ainsi que les comptes inactifs augmenter. Une nouvelle action collective réclamant 15 milliards de dommages et intérêts pour atteinte à la vie privée de ses utilisateurs ne va certainement pas améliorer l’image d’une société qui a prouvé jusqu’ici qu’elle était prête à tout pour générer des profits (y compris suivre à la trace ses utilisateurs ) .

L’autre raison pour s’attendre à une croissance molle ? C’est le Web 3.0 comme je le vois . Faire de la futurologie n’est pas à mon sens une voie à suivre pour s’enrichir en bourse, alors ceci n’est que mon opinion personnelle mais Facebook pourrait avoir du mal à monétiser son milliard d’utilisateurs sur le long terme. On en fait tous l’expérience, passé l’engouement initial pour une nouveauté du web, la fréquentation devient moins assidue (on finit par réaliser le temps qu’on y passe !) . Le Web 3.0 pourrait signifier tout simplement … moins de Web ! C’est que son usage aujourd’hui est devenu plus consommateur de temps qu’il y a dix ans, la faute aux nouvelles technologies des sites , à la surcharge d’information, au spam, et à l’attention accrue portée à la sécurité . Le Web 3.0 sera le web au service de l’internaute , désormais plus ou moins sevré de ses assuétudes du monde virtuel et plus efficient , cela veut dire un web que l’on utilise comme l’électricité, l’eau courante et le téléphone, un web qui nous rend la vie plus simple, au lieu de nous prendre tout notre temps . Cela veut dire moins de temps pour voir et cliquer de la pub. Le web mobile est déjà un pas dans cette direction et justement Facebook pourrait avoir des difficultés à exploiter ses utilisateurs dans ce contexte.



Et la quatrième raison alors ?

C'est sans doute la plus importante . Les marchés d’actions sont dirait-on entrés dans une phase baissière. Il y a plusieurs semaines déjà j’avais parlé du risque très élevé sur les bourses. Depuis le début de ce mois, le S&P a perdu 8 % , la pression des vendeurs ne faiblissant pas depuis plus d’une semaine. Selon la théorie de Charles Dow, père de l’analyse technique, le marché US serait entré dans un « bear market », le Dow Transports et le Dow Industrials ont en effet cassé leur plus bas sur 4 mois. Maintenant imaginez ce qui va se passer lorsque Apple subira enfin une sérieuse correction !