Cet article est republié de la newsletter.
Il s'agit d'une opération régulièrement
recommandée en Suisse par les conseillers financiers indépendants. Bien qu'il y
ait fiscalement des avantages certains aux rachats dans sa caisse de pension
(CP), et bien que cette solution ne consiste pas en une vente de produits
assortie de frais élevés (comme la vente d'une assurance-vie 3a souvent
proposée par les courtiers), il ne faut pas négliger un certain nombre
d'inconvénients qui peuvent selon votre situation rendre les rachats de
prestations moins intéressants.
Les rachats sont généralement recommandés aux
personnes ayant des revenus élevés ou des lacunes de cotisations. Dans ce
dernier cas, il peut s'agir d'expatriés, de personnes avec un historique
d'emploi plus court, d'indépendants ou encore de divorcés qui ont vu leur 2ème
pilier amputé après un partage de celui-ci . De même on conseille souvent aux
indépendants de s'affilier à une caisse de pension afin de bénéficier des
déductions fiscales dont bénéficient les versements au 2ème
pilier. Ces déductions sont nettement
plus élevées que dans le 3ème pilier puisque le salaire assuré
maximum selon la LPP s'élève à dix fois le salaire assuré maximum AVS (CHF 84
240), soit plus de CHF 800 000 duquel on peut déduire des cotisations 2ème
pilier jusqu'à hauteur de 25%.
L'avoir dans la caisse de pension échappe à
l'impôt sur la fortune et s'accroît sans être taxé. Surtout les indépendants
peuvent déduire de leur revenu soumis à l’AVS 50% de leur versement au 2ème
pilier. Les rachats sont plus intéressants si vous pouvez le faire quelques
années avant la retraite et surtout désirez (pouvez) retirer tout votre capital
LPP. La rente LPP est en effet imposée à 100% au revenu alors que le capital ne
sera imposé qu’à un taux réduit à la sortie et ensuite, pendant la retraite,
sur ses produits (intérêts, dividendes), et à l’impôt sur la fortune, les
plus-values n'étant pas imposées. Toutefois il est préférable d' échelonner les rachats surtout pour
les hauts revenus afin de maximiser les gains fiscaux et pour une prestation en
capital plutôt qu'en rente il faut impérativement qu'ils soient effectués au
moins 3 ans avant le départ en retraite (sinon les montants sont imposés
ultérieurement).
Cependant
il y a de nombreux autres aspects à considérer. Le principal inconvénient étant
que si vous décédez prématurément, vos héritiers ne verront pas la couleur de
l'argent que vous avez versé au 2ème pilier. En particulier si vous
avez choisi la rente plutôt que le versement du capital, en cas de décès, votre
conjoint reçoit, sauf dispositions spéciales de votre caisse (prestations
surobligatoires), juste 60% de votre rente LPP et les enfants 20% chacun
jusqu'à 18 ans ou 25 ans seulement.
En ce qui concerne les indépendants en
particulier : s'ils sont mariés, tout versement au 2ème pilier est
un capital qui peut potentiellement être amputé lors d'un divorce. Une épargne
libre ou un 3a peuvent selon le contrat de mariage ne pas être exposés au
risque de divorce et également bénéficier d'un rendement plus élevé que celui
obtenu par une caisse de pension. Les indépendants n'ont par ailleurs pas
toujours un grand choix de CP, ils
doivent s'affilier à une caisse de leur secteur. Enfin, procéder au rachat de
cotisations 2ème pilier n'est pas judicieux si votre caisse n'est
pas en très bonne santé. Si la caisse nécessite un assainissement, votre avoir
en fera les frais (sa rémunération pourrait être abaissée pendant plusieurs
années). Si la caisse est en sous-couverture et que vous faites l'objet d'un licenciement collectif provoquant une
liquidation partielle de la caisse, votre avoir de libre passage sera amputé
selon le niveau de couverture. Il ne suffit pas que la caisse ait un taux de
couverture de 100% ou plus, d'autres facteurs sont à examiner tels que la
réserve de fluctuation de valeurs (c'est la marge de sécurité de la caisse en
cas de marchés difficiles) et son niveau par rapport à sa cible, voire la
structure d'âge de ses assurés. Enfin il peut exister une sous-couverture
cachée si la caisse base la couverture de ses engagements sur un taux technique qui va s'avérer irréaliste.
Dans les années qui ont suivi le krach de 2008, un certain nombre de caisses
ont affiché des sous-couvertures importantes, les rendements ont généralement
été très décevants et le seront à nouveau si les bourses replongent. L'autre problème des caisses de pension, c'est la structure
d'âge de la population qui deviendra de plus en plus défavorable. Les rentes
des caisses de pension ne vont faire que baisser, le taux de conversion étant
régulièrement revu à la baisse.
En conclusion, avant de procéder à un rachat de
prestations, il faut prendre la peine d'examiner avec soin sa situation, celle
de sa caisse de pension et il est souvent utile de consulter un expert en la
matière tant les aspects à considérer sont complexes.