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dimanche 11 janvier 2015

Le cauchemar

La "guerre contre le terrorisme"  fait son grand retour 


Il est certes facile a posteriori de dire que les terribles évènements de la semaine dernière auraient pu être évités dans une certaine mesure, mais on ne peut s'empêcher de le penser lorsqu'on considère la constellation de facteurs qui ont mené à l'attaque sanglante contre le journal Charlie Hebdo. Le plus triste sans doute  est le concours de circonstances qui a permis aux djihadistes d'exécuter leur sinistre plan. Avec un  peu de chance le bilan n'aurait pas été aussi lourd. On sait que les djihadistes avaient été mis sous surveillance il y a plusieurs années, mais finalement ils n'avaient pas été considérés comme une priorité par les services de renseignements (http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2015/01/10/01016-20150110ARTFIG00135-charlie-hebdo-une-faille-beante-dans-le-renseignement.php). Après une réforme des services de renseignements, ils n'étaient plus sur le radar des enquêteurs.   L'auteur de la prise d'otages de la porte de Vincennes qui avait été lié lors des surveillances aux auteurs du massacre de Charlie Hebdo,  avait été condamné à 5 ans de prison en 2013, notamment pour possession d'une grande quantité de munition 7,62 x39mm (le calibre de l'arme favorite du terroriste, la Kalachnikov  http://fr.wikipedia.org/wiki/7,62_%C3%97_39_mm_M43)  alors qu'il était soupçonné de faire partie d'un réseau terroriste. Il faut se demander pourquoi il était en liberté ! 

 Ya-t-il un gouvernement à Matignon ? L'auteur de la prise d'otages de la porte de Vincennes avait été condamné à 5 ans de prison en 2013  


Or le gouvernment avait conscience du risque accru d'une attaque terroriste à la suite de ses interventions militaires contre des groupes islamistes en Afrique et au Moyen-Orient. La rédaction de Charlie Hebdo qui avait persisté et signé sur le thème de Mahomet et de l'Islam, se savait visée. Les mesures de sécurité pour protéger le journal étaient multiples, mais hélas pas encore suffisantes à l'évidence face à des hommes déterminés. Là encore, des questions seront posées sans doute aux autorités : car le journal nul doute représentait une cible privilégiée, un symbole, pour des terroristes qui cherchent avant tout à frapper les esprits.  Pourtant comme souvent chez les personnes menacées de mort depuis longtemps, l'attention s'était relâchée, le risque paraissait moins élevé.   Les policiers héroïques qui étaient sur les lieux pour protéger la rédaction n'étaient apparemment pas correctement équipés contre une telle attaque (voir lien wiki ci-dessus), malgré que la Kalachnikov, arme courante sur le marché noir, ait été utilisée dans une autre attaque sanglante à Bruxelles (la policière tuée à Montrouge n'était ,elle, même pas armée).      

Au final, trois jeunes des banlieues, qui à l'évidence n'étaient pas exceptionnellement intelligents, (et un nombre de complices à déterminer) ont réussi à semer le chaos sur le territoire français pendant  trois jours. Certains ont appelé cet attentat, le 11 septembre français, "il y aura un avant et un après ". L'état de guerre est déclaré. N'a-t-on vraiment rien, mais rien appris du tout de l'après 11 septembre ? Car le risque est bel et bien de tomber dans l'hystérie collective qui, aux Etats-Unis, prévalut après les attentats de 2001. On sait où cette hystérie collective nous a menés : deux guerres désastreuses en Afghanistan et en Irak, des centaines de milliers d'innocents morts, des centaines de milliers de vies détruites, les exactions de la CIA,  les écoutes de la NSA, la politique américaine d'assassinats par drones avec ses dommages collatéraux et j'en passe . Al Qaeda fut éradiqué, mais d'autres groupes islamistes sont apparus se revendiquant de sa mouvance, et puis avec la guerre en Syrie on a vu  l'émergence de l'Etat Islamique, il ne fallut pas longtemps pour que la poudrière irakienne s'enflamme à nouveau. A bien des égards, la menace du terrorisme est aujourd'hui pire qu'elle ne l'était en 2002, l'on se trouve devant une myriade de groupuscules et un nouveau caliphat qui a déclaré la guerre à l'Occident.




C'est la "guerre contre le terrorisme" qui  a jeté ces jeunes dans les bras de ceux qu'on voulait combattre


L'attentat de Charlie Hebdo devrait révéler à tous l'inanité du concept de "guerre contre le terrorisme", car comment peut-on mener une guerre contre les terroristes, si n'importe quel jeune désoeuvré des banlieues peut en devenir un ? Les djihadistes qui ont mis la France à feu et à sang cette semaine étaient des jeunes des banlieues comme les autres. Enfin pas tout à fait, ils étaient issus d'orphelinats, et après que les rêves de football professionnel ou de carrière musicale se soient envolés sur le coup de 20 ans, c'est l'exclusion sociale qui suivit dans l'enfer des cités (création politique française s'il en est). Notre tabloid  local a un bon article sur le parcours des frères djihadistes : http://www.lematin.ch/faits-divers/said-cherif-gche-vie/story/10048204 . Il ne faut pas s'étonner s' ils se sont tournés vers la religion dans un monde dont la seule valeur, l'argent, leur était devenue inatteignable.  Et c'est la guerre contre le terrorisme qui les a ensuite jetés dans les bras de ceux qu'on voulait combattre: les images de la guerre en Irak, les victimes innocentes des bombardements, leur ont donné, selon leurs dires, la "motivation" pour s'engager dans le djihad . Le phénomène du djihadisme français est autant un produit de la société et des choix politiques en France que celui de la guerre en Syrie et de la montée en puissance de l'Etat Islamique. On ne combat pas un tel phénomène aux causes multiples et complexes par une guerre dans le sens classique du terme. La première chose à faire pour en finir avec les djihadistes, c'est résoudre une fois pour toutes la question de l'éternel conflit israélo-palestinien. Ensuite réalisons que l'ingérence de l'Occident dans le Moyen-Orient a clairement semé les graines de ce que nous récoltons aujourd'hui. Toutefois une certaine ingérence sera nécessaire au vu de ce qui se passe en Irak actuellement (il s'agit de faire fonctionner son intelligence). Enfin la stigmatisation des musulmans, à laquelle l'Etat français a aussi contribué avec les lois sur le port du voile, n'aidera jamais dans la guerre pour les coeurs et les esprits qu'il faut avant tout mener, pour mettre fin au terrorisme.

La première chose à faire pour en finir avec les djihadistes, c'est résoudre une fois pour toutes la question de l'éternel conflit israélo-palestinien

Instrumentalisation ? Quelle instrumentalisation ? Et où nous emmènent-ils ?


Il nous reste à espérer qu'un autre épisode d'hystérie collective ne nous embarque pas dans de nouvelles atrocités, sans mentionner les nouvelles restrictions aux libertés qui seront imposées à tous.  Apparemment c'est mal parti .  Une caractéristique de ce phénomène, c'est l'exploitation par les politiques de la peur et de la colère en décretant "l'Unité nationale" afin de tuer l'esprit critique et les voix discordantes (qui sont discréditées et qualifiées tour à tour d'irresponsables, de dangereux polémistes, antipatriotes, voire carrément ... d'ennemis de la nation) . Il ne devient alors plus possible d'arrêter la mécanique en marche.

Une politicienne française appelle à la création d'un "Patriot Act" français !

http://www.lefigaro.fr/politique/le-scan/citations/2015/01/11/25002-20150111ARTFIG00172-contre-le-terrorisme-valerie-pecresse-veut-un-patriot-acta-la-francaise.php