Rechercher dans ce blog

vendredi 29 janvier 2010


Reconduction de Bernanke confirmée par le Sénat


Le monde a pourtant besoin d'un nouveau Président de la Fed.
Ainsi que d'un recentrage des activités de la banque centrale


Ben Bernanke a finalement été reconduit dans ses fonctions jeudi en fin de séance à Wall Street au terme d'un lobbying intense de l'administration Obama auprès du Sénat . Ce vote ne peut que rappeler celui qui permit à George Bush en 2004 de poursuivre ses guerres d'agression dans le Moyen Orient. Comme lors des élections présidentielles de 2004, les partisans de la continuité ont exploité les peurs du public.
Ce n'était bien sûr plus Saddam Hussein et ses prétendues armes de destruction massive qui menaçaient le pays, mais l'absence d'une alternative à Bernanke, consacré homme de l'année par Time magazine, et le spectre d'une "Grande dépression" . Si Bernanke n'était pas reconfirmé on assisterait à une rechute des marchés, le taux de chômage ne rebondirait pas. La confirmation par le Sénat de la renomination de Ben Bernanke à la tête de la Réserve Fédérale était pourtant de moins en moins certaine la semaine dernière alors que plusieurs sénateurs démocrates exprimaient leur intention de voter contre la reconduction du Président de la banque centrale. La sénatrice démocrate Barbara Boxer (Californie) avait rejoint un chœur de représentants démocrates et républicains appelant au changement à la tête de la banque centrale. Si Bernanke n'était pas reconduit dans ses fonctions avant la fin du mois -qui marque l'expiration de son mandat de 4 ans- il devait temporairement céder la place au Vice Président , actuellement Donald Kohn, et ce jusqu'à ce qu'un vote du Sénat entérine sa renomination.


Goldman Sachs aura toujours l'oreille de Bernanke lors de son deuxième mandat


Les sénateurs qui s'opposent à la reconduction de Ben Bernanke affirment la nécessité d'un changement à la tête de l'institution chargée de la politique monétaire et de la supervision du secteur bancaire. Un appel au changement qui, dix mois avant des élections parlementaires, constitue aussi une démonstration de mécontentement bienvenue auprès d 'un électorat scandalisé devant les sauvetages des grandes banques fin 2008.

Il est en effet temps pour l'Amérique de reconsidérer le rôle de la Fed et de son Président et c'est d'ailleurs ce à quoi s'attèle le Congrès américain avec un projet de loi issu du représentant conservateur-libertaire Ron Paul (Texas) visant à auditer les opérations relatives à la politique monétaire de la banque centrale.

Le Sénateur républicain Ron Paul (TX) mène la fronde contre la Réserve Fédérale


Le Congrès examine aussi la possibilité de retirer à la Réserve Fédérale son rôle de supervision des banques et de protection du consommateur après que celle-ci se soit montrée incapable de mieux réglementer le marché des prêts hypothécaires et les pratiques des banques en matière de crédit à la consommation (taux d'usure régulièrement appliqués sur les cartes de crédit). Ces initiatives sont présentées par les milieux économiques comme une grande menace sur l'indépendance de la Fed. Face à la menace d'une non-reconduction de Bernanke, Wall Street déjà sous pression avec le nouveau projet de réglementation des banques, a répondu par une brutale correction la semaine dernière. Un changement à la tête du FOMC apporterait bien sûr le lot d'incertitudes apte à faire réagir négativement les marchés. Quant au projet de loi de Ron Paul, même s'il ne vise qu'à rendre les activités jusque là secrètes de la Fed plus transparentes , sa ratification par le Congrès pourrait soumettre la banque centrale à des pressions de la part d'un Congrès généralement en faveur d'une politique d'argent facile. Les ambitions électorales prévalant souvent face aux choix difficiles, la possibilité que le Congrès puisse pousser la banque centrale à maintenir indéfiniment des taux stimulant la croissance nuirait à la crédibilité de la Fed et relèverait les attentes des acteurs financiers quant à l'inflation.
Pour la plupart des économistes, représentants de l'establishment, l'indépendance de la Fed est sacro-sainte . Pour la bonne santé à long terme de l'économie on ne saurait tolérer ce genre d'ingérence dans la politique monétaire de la banque centrale.

Les banques centrales sont des institutions anti-capitalistes, antidémocratiques, et génératrices d'inéquités


Mais prétendre que la Réserve Fédérale est indépendante ne manquera pas de passer pour de l'hypocrisie aux yeux de ceux qui n'ignorent pas les origines et l'histoire des banques centrales. La Fed n'a jamais été indépendante depuis sa création en 1913. C'est un fait qui n'est jamais mentionné mais la Réserve Fédérale comme d'autres banques centrales n'est pas à proprement parler une institution de l'état , elle dispose d'un statut semi-autonome.
Il s'agit ni plus ni moins d'une organisation privée détenue par le secteur bancaire et soumise au contrôle du Congrès. La Fed est ainsi composée de 12 banques régionales dont les actionnaires sont les banques commerciales membres. Historiquement la Fed de New York , la succursale la plus importante du système de la Réserve Fédérale, a ainsi été détenue par les grandes banques commerciales de New York. Ces banques commerciales de par le Federal Reserve Act de 1913, nomment 2/3 des directeurs de chaque banque régionale. Une étude du Congrès américain en 1976 sur la composition du comité de direction de la Fed conclut : " Il est difficile d'imaginer une représentation plus étroite (de la société) dans un comité de direction d'une institution publique que celle observée au sein du système de Réserve Fédérale… Seuls deux segments de la société – le secteur bancaire et le milieu des affaires – ont une représentation substantielle , et souvent ceux-ci sont entremêlés par leurs relations de directoires " (1). La même influence est exercée sur les autres banques centrales qui recrutent leurs directeurs au sein du même "club" dénoncé par l'étude sus-mentionnée: figures du secteur bancaire et des affaires, économistes néo-classiques représentants de l'établissement, ils sont tous issus des mêmes écoles, ont tous une expérience similaire, les mêmes connections et les mêmes allégeances auprès des décideurs des secteurs financiers et industriels.
Le secret qui entoure les processus de décisions et les opérations des banques centrales, leurs affiliations et leur actionnariat font de celles-ci des organisations anti-démocratiques. Par leur contrôle sur l'offre de monnaie et donc sur l'économie toute entière, elles constituent un gouvernement dans le gouvernement, manipulant les conditions de crédit et l'économie pour le profit de l'élite financière. La politique de la Réserve Fédérale américaine a offert ces vingt dernières années le meilleur exemple des dommages collatéraux associés au système de banque centrale. D'abord avec Alan Greenspan, Mr. Bubble, dont l'ego enflé par l'adulation des médias n'a d'égal que les bulles qu'il a créées et qui considérait les nouvelles inventions dans les instruments dérivés (CDS, CDO's etc.) comme un grand progrès dans le transfert et la répartition (en effet) du risque parmi les acteurs financiers. Ensuite avec Ben Bernanke, qui étendit le pouvoir de la banque centrale comme personne ne l'avait jamais fait pour tenter désespérément de regonfler les bulles de son prédécesseur tout en changeant les règles du jeu au bénéfice de certaines tranches de la société. Cadeaux aux banques et dissimulations, support artificiel d'un marché immobilier encore inabordable pour beaucoup de familles, expansion risquée et sans précédent du bilan de la banque centrale, promesses irresponsables de taux à zéro pour une durée indéfinie, les raisons d'être sceptique face à la nouvelle approche de la Fed sont nombreuses. Ces mesures ont nul doute permis une stabilisation des marchés et de l'économie jusqu'ici , atteignant même leur objectif inavoué de regonfler les bulles du passé - dans les matières premières et sur les marchés d'actions, émergents particulièrement.
L'économie réelle n'a pas bénéficié autant que le secteur financier des mesures exceptionnelles de la Fed: le taux de chômage ne montre pas de signes d'amélioration future, en réalité celui-ci est dramatiquement plus élevé que les statistiques de l'état le montrent (17% aux USA).
La raison principale est bien sûr que les banques ont préféré utiliser l'argent distribué par la banque centrale et le gouvernement pour le carry trade ( emprunter à 0% , placer en bons du Trésor ou dans les pays émergents) ou pour leurs opérations de "proprietary trading" plus profitables que jamais suite à la disparition de nombre de concurrents .
Entretemps, l'élite financière engrange à nouveau des profits gargantuesques grâce au retour des bulles spéculatives. Goldman Sachs dont l'influence pénètre toutes les institutions de Washington, à la manière des banquiers Rothschild au 19ème siècle, vient d'annoncer des profits records, les bonus et augmentations annoncés aux employés et associés dépassant pour certains leur compensation de 2007, la dernière année record . Goldman qui durant la crise bénéficia d'une procédure accélérée auprès de la Fed pour obtenir le statut de holding bancaire afin d'obtenir des fonds du gouvernement, Goldman qui fut le plus important bénéficiaire du sauvetage soudainement crucial d'AIG en récupérant 100% du montant de ses créances auprès de l'assureur, 12,9 milliards de dollars, le tout au frais du contribuable. Une faveur que la Fed a tenté de passer sous silence et présente aujourd'hui comme incontournable (une réduction du montant des créances en faveur des banques ou "haircut", conséquence habituelle d'une liquidation judiciaire, aurait prétendument provoqué une panique). Goldman bénéficie désormais du support de la Fed via le guichet d'escompte. Ce qui ne l'empêche pas d'être gérée comme un super hedge fund.

Les banques centrales, la Fed en tête, nient l'existence actuelle de bulles sur les marchés en présentant le même argument : même lorsque celles-ci sont présentes, les banquiers centraux peuvent difficilement les identifier et ne disposent pas des outils pour les combattre . C'est le même argument qui était utilisé entre 2003 et 2007 pour prétendre qu'il n'existait pas de bulle de l'immobilier résidentiel.
Pourquoi les économistes des banques centrales ne peuvent-ils identifier les excès spéculatifs alors que les spéculateurs eux-mêmes sont capables d'un tel discernement ?
La réponse est à trouver dans la prétendue indépendance des banques centrales, les bulles spéculatives profitent énormément à l'élite financière: le secteur financier et le secteur industriel et leurs insiders voient leur profits gonfler dans des proportions gigantesques. La bulle basée sur l'argent-dette facile est alors appelée prospérité, et tout le monde, prétend-on, partage les fruits de cette prospérité. L'état au premier chef parce qu'il engrange des recettes d'impôts plus importantes , permettant ainsi le financement des ambitions des représentants du peuple. Ceci explique pourquoi parmi les décideurs, personne ne veut vraiment mettre un terme à la prospérité de la bulle.
Chacune de ces bulles creuse encore un peu plus le fossé entre riches et pauvres , car les bénéficiaires et les victimes des bulles sont toujours les mêmes. Puisque les masses sont tenues dans l'ignorance quant à la nature des banques centrales, c'est la libre entreprise et le marché qui ont traditionnellement été perçus comme responsables de l'injustice sociale. Certes ces derniers seront toujours générateurs d'inégalités mais quelle responsabilité peut-on attribuer aux banquiers centraux et à l'élite financière oeuvrant dans leur ombre ?
Aux Etats-Unis, la croissance du revenu de la couche la plus riche de la population a commencé à clairement se distancer du reste de la population à partir de la fin des années 70 et s'accéléra au cours des années 80 . Cette période coïncide avec une série de booms, dans les matières premières (pétrole notamment) puis l'immobilier, venant enrichir les bilans des couches sociales supérieures, alors que les couches inférieures subissaient de plein fouet une économie en berne accompagnée d'une forte inflation. Les années 80, furent celles de la Reagan Revolution et de la dérégulation , la baisse des taxes favorisa l'élite financière. Son corollaire, le démantèlement du Welfare State contribua à l'appauvrissement des couches sociales inférieures. Le welfare pour l'élite financière prit la place de celui-ci avec l'arrivée d'Alan Greenspan à la Fed en 1987. Une série de bulles d'ampleur historique creusèrent définitivement l'écart entre les pauvres et les -désormais- ultra-riches, alors que la classe moyenne se vit marginalisée. Coïncidence ou non, le rythme de croissance du revenu du 95ème percentile le plus riche de la population augmenta encore plus durant l'âge d'or de Greenspan - 2ème partie des années 90- caractérisé par une forte croissance des aggrégats monétaires (voir ci-dessous le graphique des aggrégats monétaires ).
Cette inflation de l'offre de monnaie fut la cause de l' inflation des actifs (voir graphiques du S&P 500 et S&P Case-Shiller Housing Index). L'inflation telle que définie par les banquiers centraux , c'est-à-dire essentiellement l'indice des biens à la consommation (CPI), sa version "hors alimentation et énergie" et bien sûr leur hantise que sont les augmentations salariales, fut tenue en échec. Grâce en grande partie aux forces déflationnistes venant des pays à bas salaires qui bénéficièrent de la délocalisation de nombreuses industries .
Une croissance exceptionnelle facilitée par la dette , et contrebalancée par l'énorme pression sur les salaires et les prix à la consommation venant des pays émergents permit à Bernanke en 2004 de vanter l'ère de son prédécesseur Greenspan comme celle de la "Grande modération". Une ère nouvelle qui selon lui devait beaucoup aux progrès accomplis en matière de politique monétaire . Un tel argument était aussi en vogue parmi les économistes dans les années précédant le krach de 1929 et la Grande dépression .

Le revenu des plus riches a vraiment distancé le revenu médian à partir de la fin des années 70
Source: The Race between Education and Technology, by Lawrence F. Katz and Claudia Goldin (Harvard University Press, 2008)

Graphique par Economist's view http://economistsview.typepad.com/economistsview/

L'explosion de l'offre de monnaie s'est traduite non par l'inflation des prix à la consommation (pression sur les prix et salaires en provenance des pays émergents) mais par l'inflation des actifs. Les prix de l'immobilier, la bourse explosent dans la deuxième partie des années 90.



CASE SHILLER INDEX
(1890-2006)

Copyright The New York Times

Reagan a démantelé le Welfare State et puis nommé Alan Greenspan . Avec ce dernier, c'est le Welfare pour l'élite financière qui fait son entrée grâce aux bulles spéculatives.

"The Great Moderation" ! L'indice S&P 500 sous Greenspan et Bernanke

Bernanke, y-a-t-il un pilote fou dans l'avion ?








C'est que Ben Bernanke, comme Alan Greenspan, comme ses confrères du Federal Open Market Commitee n'a pas vu venir la grande crise de 2008. Au contraire, en pleine frénésie du marché immobilier entre 2005 et 2006, Bernanke alors économiste en chef de la Maison Blanche – car oui Bernanke contribua aussi à façonner la politique économique de George W. Bush - n'exprima jamais l'ombre d'une inquiétude sur l'évolution des prix de l'immobilier rassurant toujours les sceptiques en évoquant l'histoire de l'immobilier américain. Jamais le pays n'avait vécu un déclin des prix au niveau national, il n' y avait pas de bulle sur le point d'éclater tout au plus des excès locaux qui allaient se corriger graduellement sans effondrement des prix. Une théorie qu'il répéta à l'envi, comme sa conviction qu'il n'y aurait pas de contagion de l'économie par les défauts sur les subprimes.

Le Sénateur démocrate Bernie Sanders de l'Etat de Vermont, un des fervents opposants à la réélection du Président de la Fed a rassemblé une étonnante liste de citations de Bernanke depuis que ce dernier a pris ses fonctions au printemps 2006.
Voici quelques extraits de ce qui se lit comme le grand bêtisier de Bernanke : (le texte complet peut être lu ici: http://sanders.senate.gov/newsroom/news/?id=4BCD2F9A-8EED-4CD6-B9B5-8FB554D11844)



Février 2006: nos attentes sont que le déclin de l'activité (de la construction) sera modéré et que les prix des logements continueront probablement de grimper mais plus au même rythme. Donc nous nous attendons à un ralentissement du marché immobilier mais pas à un changement brutal des conditions…

Février 2008: à la fin de cette année, l'immobilier aura cessé d'être un frein à la croissance du PNB . Je suis satisfait de notre approche générale..

Juillet 2008 : Fannie Mae et Freddie Mac disposent de suffisamment de capital et ne sont pas en danger . Quelques mois plus tard les deux organismes privés de refinancement hypothécaire créés par l'état devaient être secourus et nationalisés par le gouvernement .
Mais Bernanke s’était déjà distimgué par un certain ... manque de clairvoyance avant même d’être nommé Président de la Fed par George Bush. Dès sa prise de fonction comme gouverneur de la Fed en 2002, il devint un ardent défenseur de la politique de Greenspan. Tenant le même discours qu’il tiendra en 2006 au plus haut de la bulle immobilière, il justifia la politique de Greenspan en affirmant qu’une hausse des taux pour juguler les excès de l’ère des dotcoms aurait été « l’équivalent d’une trépanation à coups de marteau ». Plus tard, lors de son fameux discours « planche à billets », il évoqua les moyens que la Fed pouvait utiliser pour inonder l’économie de crédit facile en vue de combattre une déflation, utilisant l’image d’hélicoptères déversant des billets . Ce qui devint alors la doctrine Bernanke lui valant le surnom d’ « Helicopter Ben » consacra Bernanke comme un imprimeur de billets plus zélé encore que son mentor Greenspan. En 2006, à sa nomination à la tête de la Fed, il déclara que sa priorité serait de continuer la politique de Greenspan. Greenspan lui-même avoue n’avoir jamais eu de désaccord avec Bernanke.

Récemment, Bernanke volait encore à la défense de Greenspan en justifiant la politique de la Fed entre 2002 et 2004 . Selon lui, l’envolée folle des prix des logements ne fut pas causée par les taux au plancher mais par un manque de réglementation. Un argument peu convaincant, les taux bas stimulent toujours la demande de biens immobiliers et les maintenir lorsque le jeu du « property ladder » (acheter pour louer, revendre pour acheter plus gros) s’empare du pays tout entier, ne fait que créer une spirale inflationniste des prix.
Certes, une des causes des mégabulles immobilières dans les pays anglo-saxons se trouve dans une réglementation très laxiste des contrats de location permettant de maximiser le profit. Mais Bernanke faisait allusion à la législation du marché des prêts hypothécaires.
Ironiquement c’était la Fed qui supervisait les banques et les pratiques sur le marché des prêts hypothécaires ! Et c’est seulement en 2007 qu’elle s’attela à une réforme du marché des prêts subprimes. Ces prêts en réalité remplissaient une fonction en offrant l’accès au logement aux individus sans historique de crédit (par ex. à cause de questions d’immigration, à cause d’un parcours professionnel erratique ou d’une absence de dettes et de responsabilités financières antérieures). C'est la prolifération et la vente abusive de ce type de prêts (ainsi que celle des ARM, "adjustable rate mortgages" et "negative amortization loans"), couplées à des valorisations poussées à la hausse par la spéculation et souvent gonflées plus encore par les agents et experts immobiliers - avec la complicité des prêteurs - qui fut à l'origine de la crise des subprimes. Wall Street fournit un marché pour la titrisation de ces prêts, qui une fois "repackagés " trouvaient aisément preneur . Pourquoi ? Parce que les taux étaient tellement bas grâce à la Fed, les investisseurs trouvaient là un rendement plus intéressant que celui des bons du Trésor dans des produits qui ne paraissaient pas comme spéculatifs .
Pour la petite histoire, Bernanke lui-même , comme le révèle le Time , avait contracté un de ces prêts à l’origine de la crise, un ARM, dont le taux varie suivant l’évolution du marché ! Après que le taux de son prêt ait « explosé », le Time révèle que Bernanke dut refinancer son prêt. Même dans ses finances personnelles Bernanke fit des choix catastrophiques!
Ces erreurs de jugement monumentales de la part de quelqu'un qui est regardé comme l'économiste en chef des Etats-Unis - un des problèmes dans le fonctionnement de la Fed c'est probablement aussi l'exposition médiatique et le rôle trop important de son Président- constituent le fondement des critiques à l'égard de Bernanke. Comment peut-on confier le redressement à long terme de l'économie à un homme qui non seulement n'a pas vu venir la crise mais affirma à qui voulait l'entendre, avec une assurance proche de l'arrogance, qu'une telle crise ne pouvait pas se produire ? Pour Jim Rogers , l'ancien associé de George Soros, Bernanke a fait la preuve de son incompétence et devrait démissionner . Le célèbre gourou des marchés Marc Faber, auteur du Gloom, Boom, Doom Report, va plus loin, pour lui Bernanke est un criminel.
L'inaction totale de Bernanke durant la bulle des matières premières de 2006-2007 et les émeutes de la faim qu'elle causa de part le monde, peuvent certainement être qualifiées de crime contre l'humanité. Et que dire du pillage des ressources naturelles et de la destruction de l'environnement dans les pays émergents dont la croissance effrénée est en fin de compte le résultat de la politique de la Fed ? Car c'est la banque centrale qui est à l'origine de l'endettement massif du consommateur américain et son corollaire, un déficit extérieur inondant le monde de liquidités .
Si Bernanke n'est pas un criminel , les desseins de ses maîtres dans l'ombre certainement le sont. Mais peu importe, les vainqueurs écrivent les livres d'histoire et pour Ben Bernanke comme pour Alan Greenspan et comme pour George W.Bush , les livres d'histoire se montreront cléments.
Il faudra donc patienter jusqu'à la prochaine crise financière – qui ne saurait trop tarder – pour qu'une nouvelle opportunité de réformer la Réserve Fédérale se présente . Des hommes comme Ron Paul , espérons-le, réussiront alors à ramener la fonction de la Fed à son rôle premier et essentiel, la sauvegarde du pouvoir d'achat de la monnaie, et le rôle de prêteur en dernier ressort dans un système bancaire de réserves fractionnelles - plus stricte pour les banques , pourquoi pas . Non pas au bénéfice de l'élite financière mais au service du peuple.
Liens :
L'économiste monétariste Anna Jacobson Schwartz appelle Bernanke "L'homme sans plan".
Le Sénateur républicain Jim Bunning (Kentucky) :
"La liste des raisons pour ne pas reconduire Bernanke est sans fin"
(1) Committee on Banking, Currency and Housing of the House of Representatives, 94th Congress, 2d session, August, 1976, "FEDERAL RESERVE DIRECTORS: A STUDY OF CORPORATE AND BANKING INFLUENCE.